L’accueil en France des plongeurs étrangers
À la suite d’une plainte déposée par PADI fin 2007 auprès de la Commission européenne dénonçant la non‑reconnaissance en France des certifications de plongeurs délivrées dans le monde par les agences de plongée américaines PADI, NAUI, SSI, TDI/SDI et IANTD, l’État français s’est engagé en 2010 à prendre des mesures visant à lever le frein à l’accueil des plongeurs made in US. Les touristes étrangers non CMAS restaient, en effet, soumis au bon vouloir des clubs pour plonger, sauf en Polynésie française et en Nouvelle‑Calédonie où les PADI et SSI pouvaient librement exercer leurs prérogatives comme partout dans le monde.
Bruxelles a demandé que soit levé le privilège d’accès à la plongée que la France n’accordait qu’aux plongeurs CMAS des pays voisins (essentiellement Espagnols, Italiens, Allemands, Hollandais, Belges et Anglais) dans le but de préserver les “écoles” de plongée françaises (FFESSM, FSGT, ANMP et SNMP à l’époque) de la concurrence des clubs labellisés PADI qui s’ouvrent à une plus large clientèle étrangère et aux Français séduits par les certifications PADI à l’idée de pouvoir grâce à elles plonger –ou travailler comme Divemaster ou Instructeur PADI–dans le monde entier. En témoigne le succès des doubles certifications (françaises + PADI) que beaucoup de centres de plongée privilégient aujourd’hui sur la délivrance des seuls niveaux ANMP, SNMP, FSGT ou FFESSM. Bizness oblige…
Plus seulement les CMAS
des pays limitrophes
Outre le préjudice dénoncé par PADI, la contrainte de ne pouvoir accueillir tous les touristes plongeurs, hors CMAS en faible minorité sur les 6 à 7millions de plongeurs dans le monde, représentait pour les clubs un manque a gagner estimé entre 13 et 15%. S’ajoute le préjudice subi par les Français qui s’initiaient à la plongée lors de leurs vacances à l’étranger, mais dont le niveau obtenu –Open Water moyennant 300 à 400€ en trois ou quatre jours de plongées– ne valait finalement rien en France! sauf en Polynésie et en Nouvelle‑Calédonie. Ils ne pouvaient pas faire valoir leur prérogative de plongeur dans la limite des 18 m non par manque de compétence, ni d’expérience par rapport à nos Niv.1 formés en cinq plongées, mais par la volonté des écoles de plongée françaises de préserver l’intérêt des brevets nationaux et CMAS pour plonger en France. Ainsi, chaque année, plusieurs milliers de vacanciers avec un Open Water dans leurs bagages se retrouvaient dans l’obligation de “repasser” un Niv.1 s’ils voulaient profiter librement de la plongée en France ou poursuivre vers le Niv.2, comme nous le font toujours croire les centres qui vendent la passerelle Open Water↔Niv.1.
Plongeurs aux prérogatives
reconnues depuis seulement 2012
La réforme règlementaire de la plongée en 2010 a marqué une première étape au développement de l’accueil des plongeurs étrangers avant sa refonte complète en 2012 avec une nouvelle grille d’aptitudes (PA, PE, PN, PTH) qui ne font plus seulement référence aux brevets délivrés par la FFESSM, FSGT, l’UCPA, l’ANMP, le SNMP et la CMAS (annexe III‑14b à l’article A 322‑77 du Code du Sport). Depuis, les plongeurs étrangers ont toutes les garanties d’exercer leurs prérogatives en France, sauf pour l’encadrement1, en se référant aux aptitudes exigées par le législateur pour les plongées à l’air jusqu’à 40 ou 60m2, aux mélanges au‑delà, selon la grille définie en annexe III‑14a (plongée à l’air) ou annexe III‑18a (aux mélanges); aptitudes auxquelles le directeur de plongée se réfère pour la constitution des palanquées comptant des plongeurs brevetés par la CMAS ou par les plus grandes organisations internationales de plongée membres du RSTC (Recreational Scuba Training Council), à savoir:
―PADI (Professional Association of Diving Instructors) basée en Californie, qui est la plus importante. Le quasi‑million de certifications (plus de 900000) délivrées chaque année par ses moniteurs conforte sa place de leader (70% de part de marché) sur le marché mondial de la plongée qui compte 6 à 7millions de plongeurs. En comptant les différentes spécialités comme la plongée sur épave, de nuit, sous‑glace, dérivante, profonde (40m), en étanche, la photographie, vidéo sous-marine, l’orientation… elle en a délivré par moins de 25millions depuis sa création en 1967. Ses supports pédagogies sont disponibles en 26 langues dans ses 6197 magasins et centres de plongée implantés dans plus de 180 pays: 30,2% en Amérique, 21,3% en Europe (80 centres PADI en France), 16,3% en Asie‑Pacifique, 8,6% au Japon, 23,6% dans le reste du monde. L’un des postulats de base du système PADI, c’est la plongée à l’air sans paliers dans la limite des 40m /9min, sauf les plongeurs qualifiés “tek” pour les plongées plus longues et un peu plus profondes (50m). Cette barrière fatidique des 40m correspond à une volonté d’ouvrir la plongée au plus large public, d’en faire une réelle activité de loisirs, sans souci des paliers pour qu’un plongeur en difficulté, telle qu’une panne d’air, puisse regagner la surface sans danger d’accident de décompression.
―SSI (Scuba Schools International) arrive en seconde position sur le marché mondial. Installée à Denver (Colorado), l’organisation américaine fondée en 1970 totalise environ 3.000 centres de plongée répartis dans plus de 113 pays, dont une douzaine en France. Avec ses supports pédagogiques traduits en 25 langues, elle offre, comme PADI et SDI, ses formations aux standards RSTC comme la Scuba Diver (12m), l’Open Water (encadré ou en binôme jusqu’à 18m), l’Advanced (30m), la Deep Diver (40m). Et compte comme spécialités le Nitrox, l’Extended Range pour la décompression Nitrox (pony) des plongées jusqu’à 40m avec paliers, le Trimix pour les plongées profondes (80 ou 100m), les recycleurs jusqu’à 30m sans déco, 45 ou 100m avec diluant Trimix.
―SDI (Scuba Diving International) qui, depuis sa création en 1999, s’est développée avec le succès grandissant de son agence sœur TDI pour la plongée tek. En faisant jouer en synergie les savoir‑faire de chacun: la plongée à l’air chez SDI avec ses spécialités aux standards RSTC (Open Water, Advanced, Deep Diver, etc.), ainsi que les qualifications Nitrox, Trimix et recycleurs dans les centres TDI, l’organisation internationale basée en Floride se place maintenant au troisième rang des plus grandes agences de plongée sous-marine au monde par le nombre de certifications délivré par ses clubs implantés dans 110pays, dont treize en France.
Accords passerelles
Tout comme SSI ↔ FFESSM, des accords “passerelles” PADI ↔ FFESSM entre les Niv.1, 2 et 3 d’une part, et les Open Water, Advanced et Rescue Diver + Deep dive d’autre part, avaient été signés en 2006. Ils visaient non seulement l’intérêt des plongeurs français qui souhaitaient évoluer vers les standards de plongée internationaux, mais aussi des plongeurs PADI intéressés par les passerelles de certifications pour plonger en France… jusqu’à ce que l’arrêté du 18 juin 2010 libère les conditions d’accès à la plongée en France.
Conséquence de cette réforme portant sur la reconnaissance des compétences des plongeurs, quelle que soit leur origine, PADI a décidé en 2015 de rompre les passerelles vers ses certifications moyennant une formation complémentaire sous la responsabilité d’un moniteurE3 /instructeurPADI. Une décision aussi motivée par leur délivrance sans aucun contrôle au sein des structures commerciales agréées FFESSM, à l’exemple de la double certification Open Water + Niv.1 vendue généralement autour de 450 à 550€ –ou environ 60€ la carte de certification PADI– comme passeport pour “plonger partout dans le monde”… mais souvent sans formation pour que le plongeur Niv.1 labellisé PADI soit à même d’évoluer en binôme autonome dans la limite des 18m comme l’exige pourtant l’Open Water. C’est là toute la différence avec la qualification FSGT de plongeur autonome 20m “Open Water Diver” toujours reconnue dans le cadre de l’accord signé avec PADI en 2012. Et de l’accord passé en 1997 entre l’ANMP et PADI de reconnaissance des compétences des plongeurs PADI afin qu’ils puissent s’orienter vers le niveau Niv.2 ou 3, et des brevetés français qui souhaitent devenir Advanced, Rescue ou Divemaster (guide de palanquée professionnel à l’étranger) avec le concours d’un moniteur ANMP-instructeur PADI au sein d’un club ANMP /PADI▇
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1.Obligation d’être diplômé d’État ou moniteur fédéral / CMAS (annexeIII‑15b). Prérogatives de Guide accordées aux plongeurs étrangers CMAS*** que sous conditions de la FFESSM.
2.Selon la grille définie en annexeIII‑14a, la profondeur de 60m n’est accessible qu’aux titulaires d’une qualification française ou CMAS*** / CMAS**** (délivrée aux plongeurs ayant effectué plus de 100 plongées depuis l’obtention du CMAS*** et membres d’une fédération depuis au moins 5ans).
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Article intéressant mais qui oublie de mentionner deux points essentiels:
– la formation PADI n’est pas adaptée et en tous cas suffisante à la majorité des plongées en France métropolitaine (trop profond, trop froid, visi limité, conditions météo surface difficiles). Il y a un énorme décalage dans la formation PADI entre le niveau d’autonomie donné aux plongeurs et leur compétences réelles. Dans des conditions paradisiaques (fond stabilisé à 18m, eau chaude, mer belle, bonne visi…) ca passe, mais au delà, que de frayeurs!
– Un plongeur PADI ne sait pas gérer les paliers et la désaturation (pas enseigné avant le TEC 40, cad moins de 3% des plongeurs PADI), ni les remontées assistées.
MF1 et Divemaster, je refuse d’encadrer en France des plongeurs PADI sans un complément de formation, et la commission européenne peut bien en penser ce qu’elle veut!
Le commentaire ci-dessus me rappelle mes vieilles années de plongée encadré par d’anciens militaires zélés… La guerre PADI (ou autre organisation non Fédé) et la FFESSM n’a plus lieux d’être ! La méthode de la fédé a beaucoup progressées pour se rapprocher des standards RSCT. Certes il y a encore quelques points de divergence mais cela à tendance à se lisser. Lire en 2017 des commentaires dénigrant l’enseignement PADI me semble vraiment d’un autre age. Certes les paliers de décompression ne sont pas enseignés sur des tables avant un TEC 40… mais aujourd’hui PADI, SDI, etc. forment à l’utilisation de l’ordinateur, et qu’on le veuille ou non la question des paliers y est abordé. Il y a certainement un peu a prendre des deux cotés.
Pour être MF1 et divemaster, j’ai pu apprécier les deux systèmes, et il faut reconnaître que la formation PADI et la formation FFESSM ne sont pas équivalentes du tout… PADI forme des plongeurs “loisirs” dans la courbe de sécurité, FFESSM forme des plongeurs “loisirs” avec plongée paliers. Cela change beaucoup de choses…
Un open water PADI à un niveau supérieur à un niveau 1 FFESSM, et les deux formations sont assez semblables. Mais à partir du niveau 2 FFESSM, les formations sont très différentes. Le niveau 2 pouvant descendre à 40 m encadré hors courbe de sécurité. Le niveau 3 est encore plus différent puisqu’il peut descendre à 60 m en autonomie… Bref, ce n’est plus comparable dès le deuxième niveau.
La formation PADI est beaucoup plus orientée ludique, la formation FFESSM est plus orientée “autonomie en plongée avec paliers”.
Pour plonger en France, FFESSM est plus adapté, car beaucoup de sites sont lus profond que 30 m et se plongent avec paliers.
Pour d’autres destinations, PADi suffit, même si je pense qu’on a au final un niveau de plongeur “plus technique” via une formation FFESSM.
J’ai plein d’exemples de vécu, qu’il serait trop long de partager dans ce commentaire pour illustrer.
J’ai beaucoup aimé PADI pour son côté ludique. C’est un gros atout, car on s’amuse tout au long de la formation alors que côté FFESSM, il faut souvent prendre sur soi et ne pas se décourager. Mais le cursus de formation FFESSM me semble quand même plus intéressant, plus technique et permet de maîtriser des gestes qui servent le jour où un problème survient, ce qui n’est pas fréquent, certes… mais qui arrive…
Article très intéressant. Visiblement PADI fait une multitude de formations, ce qui m’amène à dire que cette exception française me gonfle !